Loi anti-fraude : quel impact pour les entreprises e-commerce ?
Applicable depuis janvier 2018, la loi anti-fraude a fait beaucoup de bruit. En effet cette dernière va très prochainement bouleverser le secteur français de la vente en ligne. Son but de cette nouvelle loi est de réduire les possibilités de fraude à la TVA en e-commerce. Il faut dire que le cadre qui entoure la vente en ligne peut être encore ambiguë aux yeux de certains acteurs. Ainsi nous nous sommes intéressés aux nouveaux champs d’application du dispositif de détection de fraudes. L’objectif est d’analyser les conséquences sur le secteur de la vente en ligne, au cœur même du digital, dans le business e-commerce.
Les plateformes e-commerce sont visées par le dispositif
Très concrètement, avec la loi anti-fraude il est nécessaire que la solution e-commerce que l’on utilise possède une certification. Cela a pour objectif de garantir la protection des transactions. En effet, une fois effectuée, aucune modification d’achats ou de transactions ne doit être possible. Ce qui signifie qu’il ne doit pas être autorisé de supprimer une vente. Cette loi concerne donc tous les CMS (Content Management System) et logiciels de vente en ligne comme WooCommerce, Prestashop, Shopify ou encore Magento.
Toutes les entreprises qui commercialisent sur internet doivent se plier à loi anti-fraude. Cependant, les auto-entrepreneurs n’étant pas assujettis à la TVA. Ils ne seront donc pas impactés par cette nouvelle mesure de protection. Néanmoins, intégrer des modules de paiement sécurisés ne suffit pas pour être en conformité avec la loi. Bien que techniquement, elles permettraient d’apporter de la sécurité elles n’en sont pas le socle. C’est bel et bien la solution de e-commerce qui doit posséder une certification et non le module de paiement.
De plus, il est toujours possible sur une site de vente en ligne de payer par chèque ou encore à la livraison sur certaines plateformes. Par conséquent , la fraude n’est pas totalement absente. En outre, étant donné qu’un site e-commerce permet d’enregistrer des opérations comptables, il répondra aux mêmes obligations que les logiciels de caisse.
Etre certifié à tout prix en 2019 ?
“Il convient de ne pas tenir compte de la qualification du logiciel (de caisse, comptable ou de gestion) en question, mais de retenir sa fonctionnalité de caisse. Ainsi, un logiciel de gestion qui permet l’enregistrement des opérations de ventes ou de prestations de services qui concernent les non assujettis à la TVA (clients particuliers) doit être considéré comme un logiciel ou un système de caisse visé par le dispositif.”
Malgré la mise en application de la loi anti-fraude depuis janvier 2018, les politiques de répression ou les enquêtes ne verront pas le jour avant 2019. Ce qui laissent le temps aux entreprises de s’organiser d’obtenir les autorisations nécessaires à l’exercice de leurs activités.
Il est ici question de leur donner un temps d’adaptation pour mettre à jour leur plateforme e-commerce. Ainsi, les entreprises mettant à disposition de leurs clients des solutions de vente en ligne se pressent. Ils doivent trouver des solutions dans cette course à la certification. Sinon ils risquent de ne plus avoir le droit d’être utilisées sur le sol français. Pour 2019, il sera donc obligatoire suite a la loi anti-fraude d’avoir une version de ces solutions. Dans le cas contraire les entrepreneurs s’exposent à des sanctions lourdes.
Un processus onéreux mais indispensable pour la loi anti-fraude
Ces mesures de protection ont pour but de renforcer les obligations qui pèsent sur les petits commerçants en matière fiscale. En effet, la fraude à la TVA représente environ 14 milliards d’euros. Un montant important que l’Etat souhaite ramener à zéro avec cette nouvelle loi. Les commerçants devront donc mettre à jour leur système de caisse. Il devront y intégrer les fonctions de gestion de stocks ou de comptabilité. En parallèle cela engendrera des coûts supplémentaires. A titre d’exemple, une caisse enregistreuse certifiée NF 525 ainsi que la licence d’utilisation du logiciel sont coûteuses. Elles coûtent approximativement 700 euros par an. Ce qui est un coût non négligeable pour les entrepreneurs.
Il existe plusieurs variantes pour intégrer un logiciel certifié sur un site e-commerce. Par exemple avec un site développé via une technologie Open Source, il faut installer un module. Ce dernier va venir assurer la conformité de l’activité professionnelle avec le dispositif. Il est important de préciser que toute modification du code source mettra fin à la certification du logiciel de caisse. Il faut donc faire attention aux différentes mises à jour.
Pour les technologies créées et développées en interne, il faut faire appel à un organisme agréé de certification. Ce qui va générer de nouvelles dépenses pour les entrepreneurs assujettis à la TVA. De plus, cela prendra du temps du fait des demandes qui se feront de plus en plus nombreuses progressivement. Afin d’éviter des sanctions encore plus lourdes financièrement que les coûts supplémentaires qu’elle engendre, cette course à la certification sera donc coûteuse, quoique nécessaire pour les acteurs du e-commerce français.
Enfin, s’il s’agit d’une technologie Saas (Software as a service) retenue pour l’installation d’un site e-commerce, c’est l’éditeur qui a pour rôle d’assurer la conformité de votre activité aux obligations spécifiées par la loi anti-fraude. À chaque fonctionnalité nouvelle (un nouveau mode de paiement par exemple), l’éditeur reste le garant de la conformité de la solution à la loi et engage donc personnellement sa responsabilité quant aux obligations légales à remplir vis-à-vis des clients.
Les éditeurs de site e-commerce sont donc eux aussi désormais face à ce problème. C’est par exemple le cas de WooCommerce. En effet, le CMS de vente en ligne a bien compris l’importance de se mettre au diapason face à cette nouvelle loi. La plateforme Woocommerce est bien consciente des conséquences potentielles pour l’e-commerce français. En ce sens, elle va désormais passer par un organisme de certification homologué par les autorités françaises compétentes. Rémi Corson (spécialiste WooCommerce), confirmait que l’entreprise travaillait actuellement sur un système permettant d’être en règle avec la nouvelle loi : “Le système sera certifié, mais nous encourageons cependant les shop owners à obtenir leur propre certification”.
Un allègement de la loi anti-fraude pour certains e-commerçants
Il existe une tolérance administrative qui se décline directement de l’article 35 du dernier BOFIP. Les sites de vente en ligne mettant à la disposition de leurs clients les modules de paiement de type carte bancaire ou virement, ne devront pas faire certifier leur plateforme. Cette tolérance administrative explique que les assujettis à la TVA n’auront pas l’obligation d’utiliser un logiciel ou système de vente certifié dans un cas précis. Cela est possible dans le cas où la transaction passe par l’intermédiation d’un établissement bancaire établi au sein de l’Union Européenne. Concernant les modules de paiement tels que Paypal ou Stripe, aucune loi n’a encore vu le jour.
Sources :
Bofip.impots.gouv 04 juillet 2018